Amélioration continue – Le point de vue des spécialistes américains
Nostalgie – Mes premiers pas dans le monde de l’amélioration continue
Pendant mes jeunes années (il y a 4 ans…), j’ai endossé le rôle de responsable qualité de la junior entreprise de Télécom Paristech. A l’époque, j’avais été séduit par le projet de construire avec mon équipe un système de management de la qualité (SMQ) en à peine un an et de le faire certifier ISO 9001:2000. Cela fut un succès et un de mes meilleurs souvenirs d’étudiant, notamment car je me suis prouvé que je pouvais apprendre par moi-même : je n’avais jamais étudié la qualité, j’ai pris sur mon temps libre pour me mettre à niveau.Mais au-delà de la certification, j’ai surtout été marqué à vie par une méthodologie et un concept central : l’amélioration continue. Pour les curieux, je vous invite à lire la norme ISO 9001:2000 et à vous plonger sur cette “philosophie”/approche. Le principe fondateur est qu’importe le niveau initial des objectifs (qu’importe de l’endroit d’où on part), seul le fait de vouloir mettre la barre plus haut année après année est vraiment structurant (croissance, même minime, sinon rien). D’où ma devise : “vivre pour progresser !” Mais bon là je m’écarte du sujet du jour 😉
Vidéo – 3 experts américains de la performance business des sites Internet discutent de l’amélioration continue
J’ai découvert hier avec beaucoup de plaisir une vidéo dans laquelle l’excellent Bryan Eisenberg (FutureNow), accompagné par le très pragmatique Raph Wilson (Web Marketing Today) et Jim Sterne (Target Marketing) discutent du concept d’amélioration continue des sites internet. Au-delà du thème, ce sont les points soulevés qui m’ont fait plaisir car ils confirment que la vision de Converteo n’est pas isolée. Par ailleurs, les retours terrain de nos confrères américains me rassurent sur la difficulté de faire adopter une approche d’amélioration continue à une entreprise. Combien de fois ai-je pu entendre : “une fois que ces modifications seront passées, on ne touche à plus rien” ou “maintenant que notre site est optimisé, nous en avons fini avec vous”…Malheureusement, je me vois toujours obligé de rappeler que la perfection ne s’atteint pas en une fois, et qu’il faut multiplier les petites avancées sur le long terme pour capitaliser et vraiment construire un avantage concurrentiel sur les dimensions que sont le merchandising, la connaissance et l’expérience client, et globalement l’optimisation de la performance business d’un site. Alors certes, mes clients peuvent se passer de moi, mais jamais ils ne pourront se dire j’en ai fini avec les optimisations, s’ils veulent espérer rester parmi les leaders.Je vous laisse découvrir la vidéo, et je reprends la parole ensuite pour revenir sur les principaux points évoqués, et permettre aux non anglophones de comprendre l’essentiel de ce qui est dit.
Réactions – L’amélioration continue est plus un problème de culture que de processus
Parmi les nombreux points abordés dans la vidéo, il y en a quelques uns qu’il me semble intéressant d’analyser.
- Dans l’expression amélioration continue, les deux mots sont importants. “Continue” tout d’abord, car il s’agit d’une approche qui ne peut se permettre d’être interrompue sous peine d’avoir une dégradation de performance, ou du moins une stagnation. Ensuite, il y a le mot “amélioration” qui donne une direction et un sens, mais qui n’impose pas de faire des sauts de géant. Il faut avancer dans le bon sens, petit à petit, selon ses moyens. Il convient donc de se fixer une fréquence et un planning figé, avec des dates et des rendez-vous qui inscriront le processus dans un calendrier réel et continu. Ensuite il faudra se poser la question des chantiers, et avancer à un rythme adapté, avec des chantiers raisonnables. Cela ne prend pas 5 jours pour mettre en place l’A/B testing sur 2 versions d’un bouton… et pourtant les impacts business sont souvent non négligeables. Les tests de call to action sont un excellent exemple de ce que peut être les petits pas. Il faut arrêter de vouloir tout refondre à chaque fois, car là en effet, il sera impossible de le faire sur base régulière. Il sera également impossible de capitaliser (balancer l’eau du bain avec bébé)…
- Ralph Wilson se demande si le fossé entre petits et gros acteurs ne s’accroit pas. Les petits acteurs ne peuvent se permettre de s’inscrire dans une logique d’amélioration continue (notamment à cause des moyens à libérer pour faire du testing) alors que les gros acteurs peuvent augmenter la taille de leurs équipes et mener toutes les études qu’il convient. Bryan lui répond qu’il s’agit en effet d’une question de moyens (il faut en libérer pour faire les choses bien), mais surtout de culture. Je fais le même constat. Je connais de petits acteurs qui testent depuis le lancement de leur site, alors que de gros acteurs sont arrivés sur le marché avec une web agency sans même se soucier de mesurer la performance de leur site… Ce qui est un préalable à l’amélioration continue. Je crois sincèrement que chacun à son niveau peut s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue et que chacun en bénéficiera (il y aura amélioration obligatoirement…). J’aime bien l’image de Bryan, qui compare cela au fait de faire du sport. Si on va au bout de l’idée, il y a les sportifs professionnels et les amateurs, naturellement le fossé est important, mais tout le monde progresse à son niveau et c’est la seule chose qui importe.
- S’améliorer continûment demande aussi une écoute active de l’ensemble des acteurs. Toutes les équipes internes doivent avoir leur mot à dire et se sentir concernées (d’où la culture à mettre en place). Il faut surtout que chacune fasse de son mieux pour écouter le client et comprendre ses attentes.
- L’optimisation est souvent repoussée aux calendes grecques car les équipes ont l’impression d’être débordées. Il y a alors 2 alternatives : faire appel à un prestataire extérieur dont c’est le métier, genre Converteo 😉 ou et ce n’est pas exclusif, remettre à plat sa gestion du temps. Deux conseils intéressants sur ce point. Jim Sterne énonce la règle selon laquelle il faut toujours se dédier en priorité aux choses importants, plutôt qu’aux choses urgentes… une vraie révolution en soi. Bryan qui aime faire calculer le coût des réunions lorsqu’il prend part à l’une d’entre elles (chacun déclare en début de réunion son salaire horaire, et du coup les gens s’impliquent plus) rappelle un concept de bon sens sur l’investissement de son temps en tant que manager. Petit test à faire: consigner sur une feuille la liste de tout ce que l’on fait pendant deux jours puis reprendre la liste… Quels sont là les sujets que vous vous êtes astreints à traiter alors qu’ils auraient pu l’être par un employé à 10$ de l’heure?
- Vouloir continuer à apprendre est un des principes fondateurs de l’amélioration continue. Celui qui pense tout savoir de ses clients et qui pense que son site est parfait doit commencer par apprendre l’humilité et admettre son ignorance… Un de mes professeurs de philosophie com
parait la connaiss
ance à une sphère dont le volume représenterait la quantité de savoir acquis et la surface, la prise de conscience de sa propre ignorance. A méditer ! - Entre la V1 et la V2 on ne touche à rien car ça a coûté un rein. Oui, c’est vrai qu’une refonte peut coûter cher, mais bon, admettre ses erreurs peut permettre de sauver une refonte mal née… et encore une fois, la perfection n’existe pas, seule l’amélioration continue permet de s’en approcher. Pour les dubitatifs, il faut mettre en place un cadre de mesure qui permet de mesurer le R.O.I. des chantiers. Si la démarche d’amélioration continue est menée de manière correcte, le R.O.I. sera au rendez-vous. Par ailleurs, il faut se rappeler que l’Internet est hyper concurrentiel, et que pendant que vous marquerez des pauses entre chaque version, rien n’interdira à vos concurrents d’améliorer leur copie.
Pour toutes ses raisons, et plein d’autres encore, il convient de s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue. Si vous voulez creuser le sujet, je vous invite à lire l’article et le nouveau livre de Bryan Eisenberg : A/B Testing – Always Be Testing.