Le marché SOWO fête ses 10 ans… et va devoir (vite) se réinventer !
Parmi les principaux opérateurs, c’est B&You qui fêtera le premier son anniversaire en Juillet, suivi ensuite par RED by SFR et Sosh en Octobre et Free, le plus jeune des opérateurs Sowo (Sim-only web-only), fermera le bal en fêtant ses 10 ans en janvier 2022.
Depuis 10 ans, les 4 acteurs ont réussi à bouleverser durablement nos habitudes de consommation en proposant des forfaits mobile sans engagement, à petit prix.
Ces offres ont su, il y a 10 ans, trouver leur place dans un paysage d’offres mobile majoritairement orientées sur le premium avec subvention de terminal et engagement sur 24 mois.
Si le marché connaît une forte croissance, les stratégies d’acquisition utilisées depuis plusieurs années ralentissent et il est aujourd’hui indispensable de trouver de nouveaux relais de croissance.
Stratégies des acteurs SOWO : d’un enjeu de croissance de parc à un enjeu de création de valeur
Initialement, lors de leur lancement, les acteurs Sowo avaient comme enjeu principal de capter un maximum de parts de marché et de faire grossir le volume des parcs clients sur fond de guerre des prix. A l’heure de la rédaction de ces lignes, les 4 acteurs (Free, RED, Sosh et B&You) sont bien inscrits dans le paysage français et leurs parts de marché sont relativement bien sécurisées.
L’enjeu majeur est désormais à l’augmentation de l’ARPU (Average Revenue Per User) [1] client moyen et ce, sur fond de crise sanitaire, dans un contexte où la question de la cannibalisation avec les offres premium subventionnées se pose de plus en plus.
Concrètement, cette tendance s’est traduite par une augmentation constante des prix depuis 2018. A titre d’exemple, Free annonçait dans ses résultats financiers de 2020 un ARPU à 11€/mois, record absolu depuis T1 2019 et la première publication de l’indicateur (vs. 10,6€ moyen en 2019).
Un marché qui se met progressivement dans l’impasse
Afin d’augmenter le prix moyen, les opérateurs ont progressivement augmenté les enveloppes data, au point de proposer désormais, lors des temps forts, des forfaits à 200Go pour 15€ / mois (offres Big RED, Very B&You…).
Cette augmentation, qui s’est accélérée ces derniers mois, creuse considérablement l’écart entre les offres des opérateurs et la consommation réelle des clients estimée à 10,1Go/mois selon l’ARCEP[2] en 2020.
Si cette logique est très profitable pour augmenter l’ARPU des primo-accédants (ouverture d’une première ligne), elle pose en revanche plusieurs problèmes :
- L’acquisition d’aujourd’hui est plus dure que celle d’hier…
Les prix plus élevés rendent l’acquisition de nouveaux clients, depuis la concurrence, plus difficile : les opérateurs tentent par exemple de faire churner un client qui bénéficie d’une offre 40Go à 10€ avec une offre plus chère de 80Go à 14€ - … et l’acquisition de demain sera plus dure que celle d’aujourd’hui !
Les augmentations des enveloppes data rendent les propositions de valeur de moins en moins différenciantes : la plus-value perçue par le client entre 40Go et 80Go est bien plus importante qu’entre 200Go et 240Go. A terme, il n’est pas certain que l’augmentation de l’enveloppe data reste un trigger pertinent pour faire changer d’opérateur.
3 leviers pour sortir de l’impasse
Les opérateurs, disposent aujourd’hui de trois grands leviers pour continuer à générer des volumes de vente tout en augmentant l’ARPU client :
Enrichir la proposition de valeur et faire évoluer l’offre
Pour enrichir la proposition de valeur plusieurs pistes sont à explorer : par exemple capitaliser sur la 5G avec des forfaits spécifiques à la marge plus importante, proposer des services premiums (ex service client premium…) mais en soulevant alors la question du positionnement vs. les acteurs historiques, enrichir les offres de convergence [Fixe+Mobile], proposer des terminaux en exclusivité Sowo…
Optimiser les parcours on-site de bout en bout
Le deuxième levier consiste à optimiser les parcours de souscription, soit en optimisant l’existant dans une logique d’amélioration continue soit en repensant complètement les étapes qui génèrent le plus de déperdition. L’optimisation de l’existant consiste à optimiser le parcours client de bout en bout :
- en amont du site avec des campagnes média optimisées sur tous les leviers (ex : avec la DCO[3] sur le Display et le choix des créa, choix des messages relayés, formulation des CTA) et le ciblage des audiences (appétents aux promotions, jeunes…)
- sur le site : mise en avant des offres, stress marketing, skip-cross-sell…
A l’inverse, la refonte des étapes clés va nécessiter des investissements plus lourds et des évolutions du back-office des opérateurs. A titre d’exemple certains opérateurs à l’international proposent le paiement du forfait uniquement sur CB sans IBAN, à l’instar des principaux acteurs du streaming OTT[4] (Netflix, Disney+, Canal+…).
Générer des ventes sur base et de l’incrément de valeur en vie client
Dernier levier à la disposition des acteurs Sowo : l’optimisation de l’ARPU en vie client et la multiplication des ventes sur base.
La méthode la plus simple, bien connue des opérateurs, qui génère également le plus d’insatisfaction client, consiste à augmenter le prix du forfait en même temps que l’enveloppe data pour coller aux évolutions du marché. Elle reste à piloter finement car en augmentant le taux de churn elle peut également avoir comme impact de limiter la croissance nette.
Autre option, les opérateurs peuvent rendre leurs offres plus attractives pour les clients actuels (ou les anciens clients) en s’appuyant sur des promotions spécifiques (par exemple pour l’acquisition de lignes supplémentaires) ou des dispositifs de parrainage comme le fait Joi en France où 5 filleuls parrainés donnent accès à un abonnement offert.
En synthèse
- Le marché Sowo, très dynamique ces dernières années, et encore plus en période de crise sanitaire avec la fermeture des boutiques, a connu ses heures de gloire, l’augmentation des enveloppes data ayant permis d’augmenter progressivement le prix moyen des forfaits.
- Mais cette logique a ses limites avec une acquisition rendue de plus en plus complexe par des prix plus élevés et une acquisition future qui le sera encore plus, du fait d’une plus-value perçue des augmentations des enveloppes data moins importante.
- Pour sortir de l’impasse, le marché va devoir se réinventer en enrichissant les offres, en optimisant leurs parcours d’acquisition et en travaillant le parc client.
[1] ARPU : Average Revenue Per User (chiffre d’affaires mensuel moyen réalisé par une entreprise avec un client)
[2] ARCEP : Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes
[3] DCO : Dynamic Creative Optimisation (plus d’informations ici)
[4] OTT : over-the-top (hors du fournisseur d’accès à l’internet)