Pour activer un RCU, il faut avant tout le comprendre comme un Data Product
Depuis l’émergence du CRM dans les années 1990, la « vision 360 du client » captive les marketeurs. L’avènement du digital et des technologies big data dans les années 2000 a renforcé l’espoir d’une compréhension omnisciente du client. Avec l’arrivée du cloud et de l’IA dans les années 2010, cette vision s’est rapprochée de la réalité.
Face à des parcours clients de plus en plus complexes, de nouvelles solutions telles que les data lakes, les DMPs, puis les CDPs ont émergé, répondant aux défis de confidentialité et de gestion des données. Ainsi, la promesse d’un Référentiel Unique Client (RCU) commence à se concrétiser. Cependant, malgré des investissements massifs, les résultats sont parfois mitigés.
Damien Depuiset, Manager Data Technology, et Nicolas Gregson, Data Product Manager , expliquent pourquoi le RCU doit être considéré comme un produit à part entière pour répondre à ses promesses.
Pour commencer, pourriez-vous expliquer ce qu’est un RCU et pourquoi c’est important pour les clients de Converteo ?
Damien : Un RCU est une base de données qui agrège les données clients provenant de différentes sources afin d’obtenir une vision unifiée des clients d’une entreprise.
Ces données, une fois collectées et transformées, peuvent être utilisées pour personnaliser les interactions clients et optimiser les campagnes marketing. Le RCU est un facilitateur, ou “enabler”, essentiel pour améliorer l’expérience utilisateur, analyser les parcours clients, personnaliser les interactions, anticiper les décisions en temps réel, et répondre aux exigences réglementaires grâce à une gestion centralisée des consentements.
Nicolas : Au delà des enjeux technologiques, il faut vraiment concevoir le RCU comme un “data product”, c’est-à-dire comme un produit numérique, résultant d’une vision d’entreprise, avec une véritable proposition de valeur, mais qui s’appuie essentiellement sur des données pour offrir des fonctionnalités bénéfiques à ses utilisateurs. Il est essentiel de comprendre sa nature évolutive et sa capacité à être constamment amélioré.
Chaque data product résulte de trois composantes. A la base, on retrouve la donnée brute. Dans le cas du RCU, il s’agit de l’ensemble des données provenant des différentes sources. Ensuite, cette donnée est enrichie et transformée pour être rendue exploitable. Et enfin, on donne à l’utilisateur les moyens d’accéder à cette donnée. Cela peut prendre la forme de requêtes SQL, d’API, ou d’interfaces comme des tableaux de bord.
Pour répondre à la promesse du RCU, il faut voir plus loin que l’implémentation linéaire d’un projet, et surtout le considérer comme un produit visant à répondre à des besoins utilisateurs changeants.
Vous parlez d’utilisateurs, qui sont-ils dans le cadre d’un RCU ?
Nicolas : Les utilisateurs du RCU ne sont pas des clients externes, mais des employés ou consultants internes. Les utilisateurs directs sont souvent les équipes Data&Analytics qui accèdent à la base via des requêtes, tandis que les utilisateurs indirects incluent les équipes Marketing et Data Science. Ces dernières utilisent la richesse du RCU à travers des plateformes comme les CDPs, qui sont des solutions techniques pour résoudre les problèmes de connaissance client – que le RCU vise à résoudre.
Damien : Les projets de RCU sont souvent associés à des implémentations de CDP. Le RCU permet de capitaliser sur l’asset data et assure à la CDP une donnée consolidée et unifiée. Cela améliore la segmentation des audiences et la personnalisation des communications selon les canaux préférés des clients, optimisant ainsi les campagnes marketing et bien d’autres usages. Une CDP demeure un outil dont la pleine valeur dépend de comment et à quelles fins il est exploité.
Nicolas : L’ambition d’un data product est avant tout d’apporter de la valeur et de résoudre un problème utilisateur. Dans notre exemple, Le RCU répond au problème de fragmentation, d’imprécision et d’accessibilité des données. Lorsque les données sont au mieux disparates et non unifiées, au pire non accessibles, les équipes marketing ne peuvent pas exploiter pleinement leurs outils; le coût d’opportunité des insights non révélés peut être considérable. Avec le RCU, les données brutes sont transformées en informations structurées, devenant ainsi un atout majeur pour les entreprises qui savent implémenter et exploiter des CDPs. C’est le rôle du Data Product Manager de veiller à ce que le RCU répondent aux besoins de ses utilisateurs directs et indirects.
Damien : Avec le RCU, nous donnons en quelque sorte plus de pouvoir aux équipes métiers en leur mettant à disposition les données dont elles ont besoin. Le RCU se veut une solution aux défis de l’omnicanalité.
Comment mesurez-vous le succès de l’implémentation d’un RCU ?
Nicolas : Pour mesurer le succès de l’implémentation d’un RCU, nous définissons des KPI spécifiques. Ces KPI incluent par exemple l’engagement utilisateur qui repose sur le taux d’adoption de la plateforme. Le data product doit être bien conçu et bien ‘marketé’ en interne pour être adopté.
Il est également possible d’analyser l’impact sur les performances, par exemple des campagnes marketing, en termes de conversion et de retour sur investissement. Enfin, comme pour tout développement produit, le feedback des utilisateurs finaux est crucial : nous intégrons leurs retours pour affiner et optimiser continuellement le RCU, principalement suivant deux axes: traiter de nouveaux cas d’usage et intégrer de nouvelles sources de données.
Concrètement, le RCU tient ses promesses quand il permet d’harmoniser les parcours client, en lissant les effets silos d’une organisation, par la mise à disposition d’une information unifiée aux différents gestionnaires.
D’un point de vue technique, comment assurez-vous la précision et la mise à jour des données dans le RCU ?
Damien : Pour garantir la qualité des données, chaque source doit avoir ses propres processus de contrôle de qualité. Au niveau du RCU, des règles de normalisation peuvent être appliquées. Lors de la détermination de l’identifiant client unique, des règles de gouvernance assurent la complétion et l’actualisation des données. L’actualisation des données dépend des cas d’usage définis par le client et de la technologie utilisée (API, fichiers…).
La sécurité des données est une préoccupation majeure. Comment garantissez-vous la protection des informations sensibles dans le RCU ?
Damien : La centralisation des données facilite leur gestion. Nous pouvons mettre en place des politiques spécifiques pour les informations sensibles, des solutions de chiffrement (en transit et au repos) et assurer la traçabilité des interactions et des modifications. Cela aide à détecter toute activité suspecte et à maintenir la sécurité des données.
Merci pour ces explications détaillées. Pour conclure, comment voyez-vous l’avenir du RCU dans les projets futurs pour les clients de Converteo ?
Damien : Le RCU a un avenir prometteur, intégrant de plus en plus de fonctionnalités liées à l’IA et au machine learning pour analyser les données clients de manière plus approfondie, anticiper les comportements et adapter les actions. Le RCU va devenir la principale source de données pour alimenter les modèles ou algorithmes de Machine Learning.
Dans un monde orienté vers l’omnicanalité, le RCU joue un rôle crucial pour unifier les interactions clients et assurer la conformité, notamment en regroupant et diffusant les consentements aux outils marketing. De plus, le RCU devient de plus en plus interopérable avec les écosystèmes existants chez nos clients entreprises. Il constitue souvent la première brique d’une moderne “data stack”.
Nicolas : Absolument. J’ajouterai que tout l’enjeu réside dans l’adoption d’une démarche “produit” pour le développement futur des RCU. Une approche itérative nous permettra d’adapter rapidement un RCU aux avancées technologiques et aux besoins des utilisateurs, assurant leur pertinence et efficacité.
La démarche produit combine agilité, analytics (pour analyser l’usage du RCU) et feedback utilisateur pour améliorer continuellement le produit. Dans le cas de data product visant des utilisateurs externes (par exemple les clients d’un data product SaaS), la démarche produit comprend l’apport du Product Marketing. Il en est de même pour la gestion d’un RCU; pour maximiser son impact, il est essentiel de bien communiquer les évolutions du RCU auprès de ses utilisateurs directs et indirects.
C’est pourquoi il est crucial d’impliquer un Data Product Manager dans les initiatives RCU et de considérer l’implémentation d’une CDP comme le point de départ dans le cycle de vie du data product RCU.
Inscrivez-vous à notre newsletter dédiée aux métiers du Product Management :