Utiliser la data pour anticiper et limiter l’impact des ruptures de stock en e-commerce

Article E-commerce 03.07.2024
Par Antoine de Sainte Marie

Antoine de Sainte Marie est Manager chez Converteo. Ses sujets de prédilection s’articulent autour des stratégies digitales et e-commerce et de leur déploiement.

 

A retenir

  • Les ruptures de stock alimentent la frustration des clients et sont autant d’opportunités manquées pour les e-commerçants de convertir ces derniers
  • La data permet d’anticiper et de limiter l’impact des ruptures de stock e-commerce. 
  • Elle doit être associée à l’adaptation du pricing, de l’acquisition de trafic et du parcours client à l’ère de l’omnicanal

En e-commerce, l’optimisation du niveau de stock est un gage de réussite. Entre rupture et sur-stockage, l’équilibre est parfois difficile à trouver sans analyser les données pour optimiser les processus en place. Un e-commerçant en rupture de stock affronte à la fois la frustration de ses clients et des pertes de revenus au profit de ses concurrents. 

Pour preuve, l’indisponibilité d’un produit est considérée comme le deuxième irritant lors d’un achat de produit non-alimentaire, juste après l’absence de prix (OpinionWay, 2024). Cette sensibilité des clients à l’indisponibilité est plus marquée sur les catégories de produits qui souffrent le plus des ruptures de stock (mode, équipement de la maison et électronique). 

Pourtant, la data permet aux e-commerçants de suivre la disponibilité de l’assortiment, d’adapter leur stratégie de pricing, d’optimiser l’acquisition de trafic, d’améliorer le parcours client et même de mettre à profit l’omnicanalité. Explorons ces leviers plus en détails pour anticiper et limiter l’impact des ruptures sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

 

Suivre la disponibilité de l’assortiment

Une première réflexion est à mener autour de la rationalisation de l’assortiment. Plus ce dernier présente une largeur et une profondeur de gammes importantes pour couvrir l’exhaustivité des unités de besoin des clients, plus il est susceptible de souffrir des ruptures de stock ou de gaspillage. Les déclinaisons d’un produit sont des paramètres qui pèsent sur les capacités de production, d’approvisionnement et de stockage, qui plus est sur des catégories de produits pénuriques.

Vient ensuite l’enjeu du pilotage de la disponibilité produit. Les indicateurs tels que la part des produits publiés en ligne, le taux de disponibilité et le taux de rupture sont primordiaux. Ils peuvent être complétés par des données autour du taux de rotation de l’assortiment et de la durée moyenne nécessaire pour réintégrer le produit en stock. Sur les canaux de distribution en ligne D2C, ces chiffres sont relativement faciles à piloter. En e-retail, il est  généralement nécessaire de s’équiper d’une solution tierce dite de on-shelf monitoring. 

À l’ère de la seconde main, le suivi de la disponibilité de l’assortiment est d’autant plus critique que si un e-commerçant est en rupture sur un produit, les clients se tourneront plus volontiers vers des alternatives comme Vinted, LeBonCoin ou encore Vestiaire Collective. En réponse à cette tendance, des acteurs comme Stockly proposent aux e-commerçants des dispositifs de complétion de stock pour leur éviter de perdre une vente, en échange bien-sûr d’une commission versée au partenaire réalisant la transaction. 

 

Adapter sa stratégie de pricing

Lorsque la demande est plus importante que le nombre de produits disponibles sur le marché, les prix ont tendance à augmenter. Le pricing dynamique peut ainsi être utilisé pour faire monter progressivement les prix à mesure que le niveau de stock diminue. Il nécessite au préalable une étude d’élasticité pour évaluer la sensibilité des clients aux variations de prix, et ce pour ne pas nuire à l’image prix du e-commerçant sur le long terme. En fonction de la catégorie, l’optimisation de l’impact des ruptures de stock via le pricing peut être plus ou moins pertinent (produits alimentaires).

Sur le volet de la promotion, une bonne pratique est de ne pas lancer de promotions sur des produits dont le stock est limité. De la même manière, on veillera à augmenter le niveau de stock des produits qui feront l’objet d’une promotion importante. Sur un marché e-commerce où la comparaison des prix est facilitée, retenons ce chiffre édifiant : 22% des consommateurs achètent les produits de leurs marques préférées uniquement lorsque ces derniers sont affichés avec des réductions (Invesp, 2023). 

 

Optimiser l’acquisition de trafic

Sur les leviers organiques, un produit hors stock reste visible sur le site pour ne pas nuire au travail des algorithmes et au référencement en SEO. Aussi, du point de vue de l’expérience client, il est plus agréable d’accéder à la page produit avec une mention “temporairement hors stock”, plutôt que d’atterrir sur une page d’erreur 404. Pour aller plus loin, il est possible de proposer au client d’être notifié lorsque le produit fait l’objet d’un réassort.

Les leviers d’acquisition payants, quant à eux, requièrent de couper certaines campagnes d’investissement. Ainsi, les leviers Google Shopping, SEA et retail media peuvent être suspendus le temps de la rupture de stock, pour reprendre ensuite. Cette pratique a un effet positif sur la rentabilité globale du canal e-commerce. 

En CRM, il est crucial de limiter la mise en avant de produits hors stock dans les communications aux clients, voire de proposer des alternatives à ces derniers pour encourager le report vers d’autres produits. Pour aller plus loin les e-commerçants notifient aussi leurs clients lorsque les produits faisant face à une forte demande font l’objet d’un réassort. 

 

Adapter le parcours client

Afin d’adapter le parcours client, il est nécessaire de comprendre le comportement des clients qui s’apprêtaient à acheter un produit malheureusement indisponible. Certains d’entre eux vont reporter leurs achats, quand d’autres préféreront une option concurrente ou un autre canal de distribution. Ces décisions varient énormément en fonction du degré d’implication de la catégorie et de la pression concurrentielle à laquelle elle fait face. La fidélité à la marque joue également sur la patience des clients. 

Il est essentiel d’adapter le parcours client pour maintenir la satisfaction client. Ainsi, sur des produits pénuriques ou faisant l’objet d’une forte saisonnalité, une solution peut être de limiter les quantités achetables par client. On préférera alors satisfaire un nombre plus important de clients plutôt qu’une poignée d’entre eux, comme l’illustrent les récentes limitations lors du Covid-19 ou Carrefour avec sa gamme de Gaspacho en été. 

 

En plus de notifier le client lorsque le produit est de retour en stock, une bonne pratique consiste à lui proposer des alternatives en adaptant le merchandising. Aussi, les produits non-alimentaires peuvent faire l’objet d’un dispositif de pré-commande

Quoi qu’il en soit, la gestion de la relation client impose aux e-commerçants de communiquer en toute transparence auprès de leurs acheteurs en cas de rupture de stock. 41% des consommateurs français reviennent ultérieurement pour vérifier si le produit est de retour en stock, soulignant l’importance de maintenir une relation de confiance et de communication ouverte et transparente avec les clients (UPS). Ces efforts permettent de maintenir des indicateurs de satisfaction client élevés (NPS) et de décharger le service client.

 

Utiliser la data à bon escient

Les ruptures de stock concernent différentes équipes au sein de l’organisation, qui doivent mettre en commun les données disponibles pour les utiliser à bon escient. Cela est un prérequis pour partager une vision unifiée et cohérente de l’inventaire en temps réel. 

La collecte, la consolidation et la mise à disposition de la data rendent accessibles un certain nombre de cas d’usage à forte valeur ajoutée. En e-commerce, les acteurs matures adoptent ainsi l’auto-replenishment pour automatiser le réapprovisionnement de stock avant d’affronter une situation de rupture. Aussi, distributeurs et fournisseurs peuvent partager en temps réel et en toute transparence leurs niveaux de stock dans une optique de collaboration. Dans le même esprit, les prévisions de vente jouent un rôle clé en anticipant les tendances de consommation sur la base de l’historique collecté jusque-là. Enfin, des études de corrélation grâce au Marketing Mix Modeling (MMM) aident à mesurer l’impact de la saisonnalité ou de la promotion sur les ventes, et donc sur les stocks. 

 

Adopter une approche omnicanale

S’il se restreignait au canal e-commerce, l’enjeu des ruptures de stock perdrait de sa saveur. Dans un monde omnicanal, anticiper et limiter leur impact impose de considérer les points de vente physiques. Un stock unifié entre plateforme digitale et magasins facilite le pilotage de la disponibilité produit, qu’il soit incarné par des inventaires réguliers ou l’adoption de puces RFID.

Les services de Click & Collect, Ship from Store et Return in Store sont autant de cas d’usages qui abattent les frontières entre les stocks en magasin et ceux dédiés au e-commerce. Certains acteurs vont encore plus loin en affichant en temps réel la disponibilité en magasin d’un produit donné sur sa page e-commerce, à l’instar de Fnac-Darty. Le e-commerce et la distribution physique reposant sur des structures de coût différentes, les stratégies omnicanales doivent intégrer les enjeux de rentabilité (différences entre coûts fixes et coûts variables, impact du prix de la livraison dans le P&L e-commerce…).

 

Enfin, la mise en place d’un stock de sécurité pour les produits sur lesquels l’impact des ruptures est considérable peut se justifier. Ce stock est calculé sur la base de 2 variables : les ventes (maximales et moyennes) sur une période et les délais de livraisons (maximaux et moyens). Ce stock de sécurité assure une protection contre les fluctuations de la demande et les délais de réapprovisionnement, garantissant ainsi une meilleure disponibilité des produits.

Conclusion

Limiter l’impact des ruptures de stock en e-commerce nécessite une approche multidimensionnelle, intégrant une gestion rigoureuse des stocks, une adaptation des stratégies de pricing, une optimisation de l’acquisition de trafic, et une utilisation stratégique des données. En adoptant ces pratiques, les e-commerçants peuvent non seulement réduire les ruptures de stock mais aussi améliorer la satisfaction et la fidélité de leurs clients. Entrons en contact pour vérifier que vos pratiques existantes sont optimales autour de ce sujet à forte valeur ajoutée !

 

Contributeur : Amandine Nogier, Clément Delille

Par Antoine de Sainte Marie

Manager Data & Business Consulting