Le Global Media Sustainability Framework, un premier pas vers la standardisation de la mesure carbone en média

Article Media RSE 13.09.2024
Par Thomas Mainetti

Thomas Mainetti est consultant senior au sein de la practice Media, spécialiste des sujets Branding. Il nous partage ses analyses sur le nouveau Global Media Sustainability Framework et ses potentiels effets sur le marché de la mesure carbone de la publicité.

A retenir :

  • Le GARM (Global Alliance for Responsible Media) et Ad Net Zero ont présenté le 18 juin à Cannes la V1 de leur Global Media Sustainability Framework (GMSF), un référentiel commun pour la mesure de l’empreinte carbone de la diffusion des campagnes publicitaires
  • La création d’un référentiel international pour l’industrie publicitaire devrait permettre à terme une adoption plus large de cette mesure par l’ensemble du marché
  • Ce référentiel n’est encore qu’une V1 : il reste à faire évoluer et à compléter pour assurer une mesure complète de tous les médias et préciser certains aspects de la collecte et du traitement de la data

 

L’importance d’un référentiel commun pour l’adoption globale d’un KPI carbone

Au sein de l’industrie publicitaire, la mesure est un enjeu crucial. Mesurer, c’est pouvoir quantifier l’impact d’une campagne sur l’opinion des consommateurs, sur les visites en magasin, ou bien sur les ventes d’un produit. Mesurer, c’est aussi s’appuyer sur une méthodologie reconnue par tous qui permet de comparer ses résultats à d’autres acteurs. Bref, c’est la mise en perspective qui donne du sens à la mesure.

Prenons l’exemple en digital de la visibilité et de l’attention : la visibilité, basée sur une norme du MRC (Media Rating Council), est universellement reconnue, permettant aux acheteurs médias de comparer facilement différents supports en toute confiance. Par comparaison, la mesure de l’attention – plus récente – propose plusieurs méthodes de calcul, propres à chaque mesureur, compliquant son appréhension. Ainsi, malgré la promesse d’un KPI plus pertinent, peu d’annonceurs la mesurent systématiquement, contrairement à la visibilité, devenue une norme évidente et largement adoptée.

Le GARM a initialement été fondé pour adresser les problèmes de contenus inappropriés et frauduleux dans les médias et rassemble des annonceurs, agences et adtechs de nombreux pays. Il a depuis pris l’initiative de créer un référentiel des méthodes de calcul des émissions de CO2 de la publicité, première étape essentielle à une généralisation de la mesure carbone à l’échelle de l’industrie. 

On peut au passage se féliciter de la présence de nombreux acteurs français au sein de cette initiative, tels que l’Alliance digitale ou le SRI France, dont les travaux ont largement contribué à ce référentiel, et qui confirment le statut de pionnier du marché français dans le domaine.

Cette initiative impacte tous les acteurs du marché :

  • Les annonceurs : pouvoir évaluer et comparer efficacement leurs émissions carbone, au regard d’objectifs de réduction imposés par leurs engagements et la réglementation.
  • Les agences : pouvoir former leurs équipes à comprendre ces KPIs d’émissions et optimiser les plans média en conséquence.
  • Adtechs et régies : mesurer et lancer des trajectoires bas carbone, bientôt une attente majeure de leurs clients.

 

Les détails de la première itération du Global Media Sustainability Framework

Révélé aux Cannes Lions le 18 juin 2024, la première itération du référentiel carbone(1) nous en dévoile un peu plus sur sa structure, avec quatre grands axes de travail principaux :

  • Les méthodologies de calcul : Donner une mesure précise, cohérente et unifiée des émissions carbone sur 6 types de média (Digital, TV, OOH, Presse, Radio et Cinéma)
  • La collecte et l’accès à la data : Définir des process efficaces pour récupérer les données nécessaires auprès des différentes parties de la chaîne de valeur.
  • La transparence des solutions : Établir des standards d’audit et de vérification pour certifier que des solutions de mesure respectent le référentiel.
  • Le suivi de l’adoption : Développer des outils pour suivre l’implémentation et l’utilisation du référentiel à travers l’industrie

Cette V1 se concentre principalement sur la présentation des référentiels pour les six types de médias cités ci-dessus. Ces référentiels détaillent la chaîne de valeur des émissions, un framework de metrics à récupérer et leurs formules de calcul associées. Cette dernière partie n’est disponible à date que pour trois canaux : Digital, TV et OOH.

Ainsi, pour ces trois types de média, sont détaillées pour chaque étape de la chaîne (Création, Distribution et Consommation) les processus physiques entrant en compte (ex : les transmissions de données entre les plateformes d’achat publicitaire), les facteurs d’échelles (le nombre d’impressions, de chemin d’accès, le volume de data transféré), la matérialité des données (de basse à haute) et la formule de calcul détaillée associée. Avec ces éléments, n’importe qui peut donc techniquement (et soyons réaliste, avec beaucoup de temps pour comprendre et récupérer toutes les données !) créer sa propre calculatrice à l’aide de ces référentiels.

Sont aussi présents dans cette V1 (bien que moins détaillés) des templates de frameworks pour la collecte de data auprès des partenaires, pour évaluer la transparence des acteurs et pour la mesure de l’adoption de la mesure carbone.

 

Quelles suites pour ce référentiel ?

Cela a été répété maintes fois par les différents responsables du projet : ce qui a été présenté à Cannes n’est qu’une V1, une première itération pour un projet qui sera amené à être régulièrement mis à jour à mesure que les calculs d’émissions se feront plus précis et que le marché fera ses retours.

On pourra par exemple citer les formules de calculs encore manquantes à date pour plusieurs médias, mais aussi toute la partie autour de l’accessibilité de ce document. En effet, celui-ci reste malgré tout complexe à appréhender pour des décideurs (directeurs média ou RSE) qui devraient prendre la décision de se lancer ou non dans cette mesure. L’accompagnement et la pédagogie que pourront apporter les différents acteurs du marché (agences, adtechs, cabinets de conseil) sera à n’en pas douter clé dans l’adoption du référentiel. En ce sens, la V2 du référentiel, prévue pour Q4 2024, sera à scruter avec grande attention.

Toutefois, le travail du GARM et d’Ad Net Zero constitue une première étape bienvenue pour la généralisation de la mesure carbone. Cette standardisation devrait permettre à terme de sortir le marché d’un certain immobilisme sur le sujet, beaucoup ne souhaitant pas se lancer, de peur d’investir des ressources et du temps sur des calculs non validés (il a été précisé que les référentiels existants, tels que celui d’acteurs comme Scope3 sur le digital, CEDARA sur le plurimédia ou bien celui du SRI, seraient à terme déclarés « GARM compliant »).

A noter qu’avec l’annonce de l’arrêt du GARM par la WFA le 9 août 2024 (2), c’est Ad Net Zero qui reprend la tête du projet de référentiel carbone, avec l’IAB sur la méthodologie digitale.

Pour les annonceurs ayant déjà adressé le sujet et ayant recours à de la mesure carbone, il s’agira à présent de vérifier que l’outil qu’ils utilisent s’adapte au GMSF, afin d’être pleinement reconnu par le marché. Sur ce sujet, qui nécessite une expertise particulière, Converteo se tient à disposition pour vous accompagner sur ces nouveaux enjeux de mesure et de choix des partenaires.

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Sources:

  1. https://wfanet.org/sustainability-framework-download
  2. https://wfanet.org/knowledge/item/2024/08/09/wfa-discontinues-garm

Par Thomas Mainetti

Consultant Senior Media