Quels sont les prérequis pour mettre en place une CDP ?
Les Customer Data Platforms ou CDP s’imposent progressivement au sein des entreprises “data-driven”. Mais quels sont les points à prendre en compte avant tout déploiement ? David Guede, Senior Manager Data et Practice leader et Julie Laforge, Senior Manager Média et CRM chez Converteo, nous partagent leur expérience en la matière.
Comment expliquer l’intérêt croissant des entreprises pour les CDP ?
Julie Laforge : La montée en puissance de ces solutions s’explique par la volonté croissante des entreprises de bien exploiter leurs données client, afin d’améliorer à la fois leur stratégie de marketing relationnel et leurs performances commerciales. Les CDP sont des outils sur étagère, qui permettent de bien répondre à ces besoins. Ils permettent en effet de gérer la réconciliation des données online et offline et peuvent se connecter à toutes les sources de données possibles. Ils donnent également aux métiers la possibilité d’exploiter et visualiser très simplement la donnée client, contrairement à d’autres outils qui ont des usages plus “techniques”, comme un datalake ou un RCU. Les CDP offrent également davantage de possibilités que les CRM, qui se trouvent rapidement limités pour faire du temps réel ou des campagnes omnicanales.
David Guede : Pour compléter, le principal intérêt d’une CDP est de redonner de l’autonomie aux métiers, pour leur apporter une vision 360 du client. Dans un contexte où l’utilisation des données third party décline et l’utilisation des données first party croit, cette montée en puissance des CDP s’explique facilement. Ce n’est pas un outil qui peut remplacer une DMP (qui, elle, permet d’exploiter des cookies tiers), mais c’est un levier qui permet de prendre le relais. Découvrez les différences entre CDP et DMP.
Quels sont les points à prendre en compte avant d’initier un projet CDP ?
Julie Laforge : Cela peut sembler évident, mais il faut déjà avoir identifié des cas d’usage qui nécessitent un recours à une CDP, comme un enjeu de réconciliation de données online/offline ou des besoins métiers en termes d’orchestration des parcours multicanaux, de personnalisation et d’activation. Cette notion de cas d’usage est centrale pour initier un projet CDP.
Il faut aussi prendre en compte la maturité des équipes, la gouvernance des données et l’écosystème IT de l’entreprise, afin, notamment, de bien comprendre comment est organisée la donnée client. Par exemple, si elle est éclatée dans plusieurs systèmes, le recours à une CDP se justifie d’autant plus. Dans tous les points à prendre en compte en amont, il y a aussi le coût, qui dépendra des besoins et de l’option choisie (internalisation ou recours à un éditeur).
David Guede : Il y a en effet plusieurs prérequis techniques et non techniques à remplir. Par exemple, si l’entreprise n’a jamais fait de campagne e-mail ou n’a pas déployé de CRM : il faut déjà commencer par là, car sinon, une CDP ne sera d’aucune utilité. De même si elle ne sait pas mesurer finement sa conversion globale, dans ce cas, l’hyperpersonnalisation ne sert à rien… En outre, comme la CDP ne s’adresse pas qu’à un seul métier, il faut donc que le département marketing soit suffisamment mature pour travailler ensemble et ainsi permettre d’optimiser la stratégie digitale.
Tous ces points sont cruciaux dans le ROI d’un projet CDP : si ces conditions ne sont pas remplies, le risque est d’avoir des coûts trop élevés par rapport aux gains espérés.
Pour maximiser les chances de réussite de son projet, quels sont les interlocuteurs à mettre autour de la table ?
David Guede : Souvent, on a d’un côté des équipes opérationnelles qui veulent une interface simple et efficace, et de l’autre l’IT qui fixe ses contraintes. Plus tôt les différentes équipes se parlent, mieux c’est. Mais il est toujours compliqué de répondre aux attentes des deux… Par exemple, dans la plupart des cas, la solution la plus simple à maintenir dans le temps n’est pas celle préférée par les métiers. En outre, il convient aussi de prendre en compte très tôt les enjeux de gouvernance – savoir quelle est la donnée qui prime lors de la réconciliation, comment doivent être traitées les données sensibles, comment gérer les profils multi-pays, etc.
Julie Laforge : Sur ce sujet de la gouvernance, il faut bien comprendre qu’il n’y a pas d’organisation-type : il faut étudier comment chaque entreprise est organisée et a structuré sa donnée. Ce qui compte, c’est d’identifier à chaque fois les bons interlocuteurs : ceux qui vont mettre en place la solution et la maintenir, ceux qui vont l’utiliser au quotidien et ceux qui vont cadrer et superviser l’usage de la data… Dans cet écosystème d’acteurs, on retrouve donc l’IT (pour le déploiement, la mise en place et la maintenance des connecteurs, la gestion des tags…), les métiers (marketing, média, web/app, ventes…) sans oublier le DPO (pour cadrer les sujets autour du respect de la RGPD) .
Pour conclure, quelles sont les tendances à prendre en compte en matière de CDP ?
David Guede : La grande tendance aujourd’hui est à la convergence entre CDP et marketing automation. Cela s’explique naturellement, puisque les outils de marketing automation permettent d’activer les données de la CDP. Mais à l’heure actuelle, ces outils sont limités par l’usage d’un identifiant unique, l’e-mail. Certains éditeurs s’orientent donc vers l’intégration d’une brique de marketing automation au sein des CDP, pour exploiter les données de façon plus poussée.
Julie Laforge : L’autre tendance c’est l’approche hybride/”warehouse first”, qui offre plus de flexibilité qu’une centralisation totale de la donnée au sein d’une CDP. Ces dernières années, beaucoup d’entreprises ont en effet fait l’effort de centraliser, réconcilier et nettoyer leurs données client dans des data warehouses. L’idée maintenant est de capitaliser sur ce travail, avec une CDP qui vient se connecter à ces data warehouses. Cela permet de gagner du temps et de déployer rapidement des cas d’usage. L’entreprise peut ainsi capitaliser sur l’existant, optimiser le stockage de ses données tout en gardant la main dessus.